Jeudi 28 Mars 2024
DIVAGATIONS DE PATRICE
Dimanche, 20 Septembre 2020

parapluie20ph

Feria soñada, pluie y ultime merienda...

La pluie d’Antonio José Galán un 14 juillet 1973 à Pamplona, face à un toro de Miura.

L’horloge du lycée indiquera plus ou moins 13.48.

Une paire de jaunâtres et anchoïade de primero.

Chistes de puta madre, vino de la tierra et rires de bonheur dans la langue nôtre.

Celle qu’on parlait quand, minots, on rentrait de la piscine municipale de l’impasse Verdet en partageant une fougassette, celle qu’on parle toujours dans les mazets des cigalons, celle qui animait les matches du vieux stade Jean Bouin, celle que parlent aujourd’hui les 12% de chômeurs, celle qui, chaque fois que je l’entends, me scotche de bonheur.

La pluie…

Gardianne de segundo et chemise probablement tâchée pour accompagner nos tonterías d’estrambord langagier.

On brassègera les idées reçues, on boulèguera les canons taurins, on cherchera des ouvertures aux conneries possibles, on taquinera l’orthodoxie d’une véronique, on chatouillera le pico de la muleta, on commandera au picador du « Juli », on estoquera le toro d’Enrique, on offrira notre lexique à Castella.

La pluie de Dámaso Gómez à Nîmes en 1969 et la pluie de la puerta gayola de Padilla avec le toro de Partido de Resina à Arles en 2000.

A la table d’à côté, sûr, un pébron chantera «  A la font de Nîmes » .

Je l’écouterai :

« A la font de Nîmes

I'a un ametlièr

Que fa de flors blancas

Coma lo papièr

Se canta, que cante

Canta pas per ièu

Canta per ma mia

Qu’es al luènh de ieu ».

La pluie encore…

Fougasse d’Aigues-Mortes, rhum « Havana Club » de postre et l’affection des dernières embrassades pour oublier le sourire des amis qu’on aurait retrouvés et qu’on aimerait se garder avec soi pendant les cinq jours, celle des abrazos devant la statue de Christian qui se pendit parce que « Pañolero » l’avait rendu tétraplégique et qu’il savait qu’il ne pourrait plus se remettre devant un toro, celle des bises devant les étagères en bois de la librairie de Teissier, autour du comptoir en planches vertes de chez « Titou » ou, immortels dans le souvenir, autour d’un plat de pieds-paquets au 18 rue Notre Dame ou assis sur la chaise de la devanture de Marius.

La pluie et les deux oreilles et la queue du Juli à Nîmes devant le Torrealta le 25 mai 2001.

Et, tout à côté, le 24 de la rue Fénelon, avec, au fond du jardin un figuier qui, pour l’éternité, poussait dans le vieux mur.

Quatre jours entiers qui auraient pu être ya pasados, des morceaux de nuit qui auraient pu être des déchirures, des lambeaux d’affection grappillée au hasard de la tendresse, belleza du toro et splendeur du toreo qui auraient pu nous écarquiller les yeux et puis les amis, le bruit, la fatigue, le volume léger des formes de ma ville.

La pluie toujours.

Ce soir, quand le soleil absent descendra vers St-Césaire et Caveirac, tout aurait pu être fini.

La vie qui passe.

Vite.

Comme un train d’arrastre...

Patrice Quiot