Vendredi 29 Mars 2024
Istres
Lundi, 20 Juin 2016

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Majestueuse symphonie en six mouvements au Palio où Enrique Ponce a arrêté le vent et tutoyé les anges...

Il n’y a pas de mal à se faire du bien, parait-il. Ce dimanche, dans les arènes du Palio, la grand-messe qui clôturait la feria 2016 restera mémorable. Pour tout dire, on s’y attendait un peu et franchement, Enrique Ponce nous a transportés au-delà des espérances les plus folles, d’abord grâce à la finesse de son toreo, mais aussi par la qualité du comportement à la muleta de plusieurs de ses opposants. 

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A ce sujet, on va tout de suite en finir avec les sempiternels bémols sur le volume, la longueur des cornes et le nombre d’assauts au cheval, Istres n’est ni Saint-Martin ou Vic, pas plus que Sanlúcar de Barrameda ou Olivenza ne sont ni Madrid, ni Bilbao ! Sortons-nous donc de cet éternel faux débat pour rappeler que le toreo n’est pas régi par un modèle unique, comme la pensée du même nom. Et que cette diversité doit rester la seule règle, avec évidemment celle du libre choix... sans passer sous les fourches caudines de « los sabios » ! A chacun ses ressentis, ses petits plaisirs, ses ravissements qui ne s’expliquent pas forcément, et qui parfois sortent davantage du cœur que de la raison. Et qu’on n’a pas sans cesse envie de justifier à la barre du tribunal des censeurs, des huissiers de service ou de ceux qui par sotte dérision se complaisent à jouer les Cassandre… quand ça les arrange, évidemment !

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A Istres, on aime les ambiances particulières, les histoires mises en scène par Bernard Marsella. Personne n’est obligé d’y adhérer, mais ceux qui se rendent au Palio savent ce qu’ils vont voir et y viennent dans l’espoir d’y trouver un enchantement, quelque chose de spécial, de différent, d’original. Vous allez certainement penser que je suis un peu cucu la praline, ou romantique, voire naïf, bref totalement couillon, mais je m’en fous, je suis comme je suis, et quand je ressens certaines émotions, je n’ai pas besoin de livres ou de conseillers en orthodoxie pour avoir une petite érection ! Restons modestes, mais quand-même, putain, avec Ponce aujourd’hui, dans une nouvelle version du Rouge et du Noir,on était carrément dans l’excellence, la vraie, la trop rare...

Avec trois toros de Juan Pedro Domecq (1, 3 et 5) et trois autres de Núñez del Cuvillo, bien choisis pour la circonstance, au demeurant peu piqués mais combatifs la plupart à la muleta, Ponce nous a offert trois heures de magie, bien soutenu par l’orchestre Chicuelo et les chœurs, dirigés par Rudy Nazy et Michel Cloup, qui dirige l’Orchestre Montois, venu en invité. Exceptionnellement, la musique balayait des répertoires qui sortaient des sentiers battus et qui doivent justement rester réservés à ce genre d’événement. C’est comme ça qu’ils n’en sont que plus beaux !!!

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Après un air du toréador chanté par le baryton Frédéric Cornille, Enrique Ponce, vêtu de sang et or, a d’abord reçu en piste un souvenir de la part du maire d’Istres, François Bernardini, entouré d’un représentant de la région PACA et de Bernard Marsella, pour une première ovation de gala...

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Enrique Ponce : oreille, oreille, deux oreilles et queue, deux oreilles et queue symboliques, oreille et oreille.

A noter encore que les deux sobresalientes, David Saleri et Jérémy Banti, n’ont pas eu l’occasion de faire un quite.

Enrique Ponce débuta avec un premier client qui prit une pique cuidée avant d’afficher sa maestría au cours d’une faena toute en douceur qui donna le ton de ce qui nous attendait. Visiblement dans de bonnes dispositions, le maestro de Chiva récolta son premier trophée après entière et descabello.

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Avec le second, qui afficha sa mansedumbre au cheval, Ponce entama sa faena en se fendant sur les doblones. La suite par mouvements templés ponctués par de superbes changements de mains, une de ses spécialités. Metisaca puis entière.

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Puis sortit « Navegante », un juanpedro qui quelques minutes plus tard allait être honoré de la vuelta posthume. Après une pique trasera, l’orchestre et les chœurs envoyèrent la musique du film Christophe Colomb après que Ponce eût brindé à Bernard Marsella.

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S’ensuivirent des séquences d’un autre monde, et si Enrique ne nous fit pas découvrir l’Amérique, il nous a refilé la chair de poule, avec les poils qui se hérissent dans les moments les plus émouvants. Ceux dont on se souvient et dont on parle des années durant...

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Conclusion par superbe recibir, Ponce récoltant un rabo pour la circonstance.

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Après une vuelta sur l’air de « Dios te salva María » entonné par Frédéric Cornille et les chœurs, ce fut ensuite le tour d’« Esparraguero », un Cuvillo qui allait gagner le droit d’aller honorer les dames dans ses verts pâturages...

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Un toro bien emmorrillado qui poussa sur un unique assaut, mais soutenu. Brindée à Guillaume François, la faena allait tout de suite atteindre des sommets, Ponce nous faisant encore lever le poil au son de « Caridad del Guadalquivir », une émouvante musique jouée à Séville durant la Semana Santa...

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Enrique sortit alors le grand jeu, nous faisant la totale sur plusieurs séries relâchées et empreintes de sentiments, de celles qui arrêtent le temps et qui finirent par décider le président Jeannot Teisseire à sortir le mouchoir orange... à la demande d’un public qui rendit milliardaire le marchand de kleenex !!!

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L’arène mit quelque temps à digérer ce chapitre exceptionnel d’une très belle histoire, juste le temps pour Enrique d’enfiler un smoking pour venir parachever son œuvre. Il ne manquait que le tapis rouge et les marches du Casino, mais dans l’esprit, ils étaient bien présents ! Sortit alors le quinto reçu par larga, et après une pique poussée et une petit séance de nettoyage du costard par Franklín, Ponce alla brinder à son ami Antonio Chavari un trasteo soutenu par l’Aigle Noir.

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Face à un opposant manquant de forces, il s’employa à cuider ses muletazos, un exercice dont il s’est fait la spécialité. Belle leçon de dominio avant entière tombée d’effet immédiat.

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Comme toutes les bonnes choses ont aussi une fin, Enrique allait boucler la séance par une dernière oreille obtenue après un bon tercio de banderilles qui a vu Mariano de la Viña et Emilio Fernández saluer. Dernier brindis à l’auditoire, Concerto d’Aranjuez pour accompagner plusieurs séquences méritoires face à un opposant qui ne fut toutefois pas le protagoniste du meilleur livret de ce formidable scénario. Mais l’essentiel était déjà derrière...

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Sortie a hombros avec l’Hymne Valencian. Un bien beau final pour le dernier héros en date, consigné en bonne place dans le Livre d’Or des Arènes du Palio... Enhorabuena y Gracias, Maestrazo !!!

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Une fois la grande porte franchie par Ponce, le public, à commencer par le maire, a invité Bernard Marsella à venir saluer, l’empresa récoltant à son tour une ovation de gala…

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Burladero décoré par José Manrubia

En matinée, dans une arène bien garnie et avec beaucoup de vent, corrida décevante du Pilar avec des toros nobles, mais trop souvent justes de forces.

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Joaquín Galdós (saluts aux deux) a pris l’alternative avec « Buscagna », un toro qui alla d’emblée cogner contre les planches et qui s’avéra sérieux dans ses attaques. Galdós alla brinder à son père après la cérémonie et de longues de palabres de Manzanares, puis le Péruvien proposa une faena harmonieuse au son de Manolete, à l’impact hélas rabaissé par le mauvais maniement de la ferraille. Avec le dernier, Joaquín se distingua au capote puis se montra appliqué et relâché avec la flanelle lors d’un trasteo à mi-hauteur rematé par entière un poil tombée.

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Manzanares (applaudissements et oreille) dut abréger devant son second qui s’invalida en cours de faena. Avec le quatrième, l’Alicantino signa quelques beaux détails sur la fin pour se justifier, les rafales ne l’empêchant pas de séduire les gradins qu’il fit lever sur un recibir.

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Alberto López Simón (oreille et applaudissements) prit un premier toro limité de forces qui fit faire un tour de montagnes russes à Tito Sandoval. Brindis refusé par un secteur du public puis faena qui alla a más, au point que les mêmes, ou d’autres, finirent par réclamer un trophée après une entière en place. Au cinquième, un burraco huído de salida qui fit ensuite une vuelta de campana avant d’aller prendre une ration en mode simulacre, la faena tourna court, le Pilar finissant invalide, ce qui contraignit Alberto à boucler rapidement le chapitre...

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