Mardi 30 Avril 2024
Têtes de Turcs
Mardi, 31 Janvier 2012

Suite à ma chronique d’hier, pour plus de clarté… et d’objectivité, l’intégralité du communiqué du G10…

"Nous, toreros faisant partie de ce qu’on appelle le G10, avons décidé de nous unir l’année dernière pour assumer notre responsabilité face à l’avenir de la Fiesta. Nous avons compris que devant les menaces, notre rôle envers elle était de riposter. Nous devions réfléchir, faire notre autocritique et intervenir pour éviter l’écueil de l’isolement.

La première initiative que nous avons réalisée, avec la Mesa del Toro, pour répondre à l’inquiétude de nos compañeros, a consisté à promouvoir le passage du Ministère de l’Intérieur à celui de la Culture.

On a aussi réussi à ce que tous les toreros se retrouvent dans une même association. L’actuelle « Unión de Toreros »est née de la fusion des deux groupements qui existaient alors, Taura et Protauni, avec l’ambition d’essayer de résoudre un autre grand problème de la Fiesta, la déstructuration.

Le G10, en accord avec les autres toreros de l’Unión, s’est mobilisé pour défendre la Fiesta en Catalogne, il a financé l’ILP et a essayé d’intervenir dans le contexte politique pour arriver à ce que les toros ne soient pas une querelle idéologique ou partisane.

Préoccupation

Avec le même souci, nous avons défendu la baisse de la TVA – dans la mesure où les toros étaient reconnus comme Bien Culturel – et dans différentes administrations, comme la Comunidad de Madrid, on a envisagé la baisse de la redevance pour la concession des arènes. Ces initiatives, l’IVA et la redevance, prouvent que les toreros du G10 ont pris conscience des difficultés des empresas. D’où une conclusion vidée de sens selon laquelle on cherche un affrontement en ce qui concerne les droits de la télévision.

Que demande-t-on ? Nous voulons que soit reconnu pour les toreros le droit de défendre et gérer leur image. Encore plus quand l’audiovisuel est le lien fondamental pour établir des ponts entre une société qui s’éloigne du phénomène taurin. Ce n’est pas pour autant une question d’argent. On veut être responsables de nos droits d’image pour une meilleure et plus importante diffusion. On a pris le parti de nous retourner vers les chaînes généralistes et on revendique un traitement informatif plus régulier et constructif.

Le scénario existant jusqu’à présent nous empêchait d’assumer un tel objectif. Il s’était établi une dynamique à partir de laquelle les empresas et les opérateurs établissaient bilatéralement les conditions de retransmission des grandes ferias. Les toreros restent relégués au second plan, on peut même les exclure des ferias, comme c’est arrivé s’ils ne se pliaient pas aux conditions établies, hors de leur consentement et sans qu’ils en aient connaissance. Nous considérons que c’est une anomalie et que ça doit être corrigé.

Nous avons trop peu souvent connu quand et comment on a été télévisés, quels droits avaient été vendus, combien de rediffusions avaient été décidées, comment ça se passait sur le plan international ou avec le développement d’autres plateformes, comme Internet, steaming… C’est pour ces raisons que l’Union des Toreros a fait appel à une société spécialisée dans les droits télévisés (ASM). Tous nos compagnons ont pu adhérer, comme nous l’avons fait, mais il y a eu d’évidentes pressions de la part des empresas pour éviter que ce projet global prenne corps au cours de cette temporada. Ça reste ouvert pour les prochaines. Notre souhait est que tous les toreros finissent par nous rejoindre, mais nous comprenons que nous, membres du G10, pouvons mieux supporter les pressions évoquées dans ce début de projet légitime.

Têtes de Turcs

Nous savions que ce serait difficile. Nous avons également observé que de bizarres alliances imprésariales ont vu le jour, ainsi que des pactes corporatistes, afin de faire avorter notre initiative. On a cherché parmi nous des têtes de turcs et toutes sortes de représailles vont se produire, comme cela a commencé avec la Feria de Valencia. Mais nous sommes unis et nous pensons avoir raison.

Le problème n’est pas économique, ni quantitatif. Il est qualitatif. Nous pensons que la répartition des retombées ne prend pas compte équitablement de notre protagonisme et de notre exposition. Nous sommes poussés par une motivation éthique, pour autant qu’on ait beau essayer d’user de la démagogie et de l’intimidation pour minimiser un débat plus profond. Nous n’avons pas réclamé un euro de plus aux télévisions. Nous sommes conscients de la crise et nous l’avons ressentie. C’est pourquoi nous insistons sur le fait que l’argent ne soit pas la priorité, mais plutôt le respect.

Les chiffres ? Il nous paraît normal que les toreros se répartissent 50% des droits télés. On ne parle pas du G10, mais du pourcentage qui devrait correspondre aux toreros pour chaque course retransmise, la nôtre serait la part proportionnelle à nos prestations. Cela a été la seule proposition avancée par ASM dans les négociations.

Nous sommes tellement préoccupés par la situation de la Fiesta que nous nous sommes entendus entre nous pour créer une Fondation afin de la revendiquer et la défendre dans sa dimension culturelle, sociologique et éducative. De fait, nous allons la financer, précisément par l’argent recueilli avec les éventuels droits télévisés. Sa promotion et l’impact sur les jeunes nous préoccupe, tout comme la situation des infirmeries dans pas mal d’arènes ou la précarité de nombreux toreros qui prennent leur retraite. Nous sommes scandalisés par le fait de voir les toros utilisés comme emblèmes politiques et indignés de voir que la Fiesta soit prohibée, comme en Catalogne, ou édulcorée, comme à Quito.

Toutes ces réflexions, partagées par la « Unión de los Toreros », devraient faire partie de la préoccupation générale. C’est pourquoi nous n’avons pas voulu nous impliquer dans une guerre de déclarations, de démentis ou de querelles verbales. Nous parlons maintenant parce que notre message a été déformé et parce qu’une série de chiffres, de commentaires et d’informations  qui prétendent réduire le débat à l’argent en nous faisant passer pour des mercantiles, ont été divulgués de façon partiale et arbitraire.

A nous, les toreros, on nous a toujours dit de toréer, un point c’est tout. On ne va pas arrêter de le faire, mais il est certain qu’on va s’occuper de veiller sur la tauromachie parce qu’elle nous a tout donné et que nous croyons en ses valeurs."

Les toreros du G10 : Enrique Ponce, Morante de la Puebla, César Jiménez, El Juli, El Fandi, José María Manzanares, El Cid, Miguel Ángel Perera, Cayetano Rivera et Alejandro Talavante.

...Voilà, vous n’ignorez plus rien des actions entreprises par ce fameux G10, ainsi que de sa philosophie, et sans rien enlever à ce que j’écrivais hier, plusieurs autres réflexions me viennent à l’esprit…

D’abord,  si l’on s’en tient à la lettre, et même à l’esprit, certaines de ces actions sont louables, leurs bonnes intentions devenant plus suspectes au chapitre du désintérêt. Et les occasions de manifester leur générosité ne manquent pas… Quant à se plaindre que les rares chiffres que l’on connaisse ne reflètent pas la réalité, le mieux qu’ils aient à faire, c’est de publier les bons ! Ceux de leurs contrats en particulier…

Ensuite, j’y reviens, avec leurs apoderados, qui si je ne m’abuse doivent servir à ça, il aurait été possible de négocier feria par feria, car toutes ne sont pas concernées par la télé, leurs pourcentages de droits d’images, comme ça se fait pour leurs cachets. Et embaucher une société spécialisée, c’est faire bien peu de cas de leurs mentors…

Enfin, si le mot union revient souvent, dans ou hors du G10,  je ne suis pas sûr qu’ils soient pour autant si unis que ça. L’avenir nous le dira, mais n’oublions pas non plus que si certains toreros n’ont pas voulu rejoindre ce G10, c’est selon leurs propres mots parce que les principaux initiateurs défendent avant tout leurs propres intérêts…

Plus haut, en signature, figurent les dix noms. Les autres les rejoindront-ils dans cette aventure ? Vu comme c’est parti, ce n’est pas vraiment gagné…