Mercredi 08 Mai 2024
PATRICE
Vendredi, 08 Décembre 2023
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Virgile : Le combat des taureaux…
 
« Le meilleur moyen d'affermir la vigueur, soit des bœufs soit des chevaux, selon ce qu'on préfère, est d'écarter Vénus et les aiguillons de l'amour aveugle. 
 
Et c'est pourquoi on relègue au loin les taureaux, dans des pacages solitaires, derrière la barrière d'une montagne, au-delà d'un large fleuve, ou encore on les garde enfermés dans l'étable près de crèches bien garnies. Car la vue d'une femelle mine peu à peu leurs forces et les consume et leur fait oublier les bois et les herbages. 
 
C'est elle encore, par ses doux attraits, qui force souvent deux amants superbes à combattre à coup de cornes. Tandis que paît dans la grande Sila la superbe génisse, eux, s'attaquant tour à tour, engagent une lutte violente et se couvrent de blessures : un sang noir baigne leur corps; front contre front, ils entrechoquent leurs cornes avec un vaste mugissement, dont retentissent les forêts et le lointain Olympe.
 
Désormais, une même étable ne réunit plus les combattants, mais l'un, le vaincu, s'en va et s'exile au loin sur des bords inconnus, gémissant longuement sur son ignominie et sur les coups de son superbe vainqueur, puis sur ses amours qu'il perdit sans vengeance ; et, le regard tourné vers son étable, il s'est éloigné du royaume où régnaient ses aïeux.
 
Alors il n'a d'autre souci que d'exercer ses forces ; il s'étend la nuit parmi de durs rochers sur une couche sans litière ; il se nourrit de frondaisons épineuses et de laîches piquantes ; il s'essaie et s'apprend à concentrer sa colère dans ses cornes, en luttant contre un tronc d'arbre ; il harcèle de ses coups les vents et prélude au combat en faisant voler le sable.
 
Puis, quand il a rassemblé sa vigueur et rétabli ses forces, il entre en guerre, et fond tête baissée sur son ennemi qui l'a oublié. Telle la vague commence à blanchir au milieu de la mer haute, puis, à mesure qu'elle s'éloigne du large, se creuse de plus en plus, puis, roulant vers la terre se brise contre les rochers avec un bruit affreux et retombe de toute sa hauteur ; cependant l'onde bouillonne jusqu'au fond du gouffre, et de ses profondeurs soulève un sable noir. »
 
Virgile.
 
 «Les Géorgiques» .Livre III.
 
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Datos 
 
Virgile (Publius Vergilius Maro), dit « Le Cygne de Mantoue », né vers le 15 octobre 70 avant. J.-C. à Andes, dans l'actuelle Lombardie et mort le 21 septembre 19 avant. J.-C. à Brindisi (dans le Sud), est un poète latin contemporain de la fin de la République romaine et du début du règne de l'empereur Auguste.
             
Son œuvre, notamment ses trois grands ouvrages qui représentent chacun un modèle dans leur style (l'Énéide en style noble, les Bucoliques en style bas ou humble, et les Géorgiques en style moyen), est considérée comme représentant la quintessence de la langue et de la littérature latine. Elle a servi de référence et même d'idéal esthétique à des générations de lettrés européens, en particulier chez les défenseurs du classicisme.
 
« Les Géorgiques" est un poème didactique terminé en -29 qui se divise en quatre livres abordant successivement la culture des champs, l'arboriculture, l'élevage du bétail et l'apiculture.
 
“Le combat des taureaux” est tiré du livre III.
 
Patrice Quiot