Mercredi 08 Mai 2024
PATRICE
Vendredi, 10 Novembre 2023
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Le toro écorché…
 
Hissé.
 
Par un palan.
 
A chaine.
 
 
 
Mort.
 
Distendu.
 
Pendu par les sabots arrière.
 
 
 
Dans l’outrance.
 
De sa position.
 
De sujet des tribunaux de l’Inquisition.
 
 
 
Il occupe.
 
Encore.
 
Tout l’espace.
 
 
 
Et fait.
 
D’un lieu d’équarrissage.
 
Un Golgotha de dévotion.
 
 
 
Long.
 
Mat.
 
Fin.
 
 
 
Il est.
 
Presque plus grand.
 
Qu’avant.
 
 
 
Les cornes.
 
Encore.
 
Terrifiantes.
 
 
 
Les muscles.
 
Sourdant.
 
Sous la peau.
 
 
 
Et le poil.
 
Aux reflets.
 
De soie bleue.
 
 
 
Disent
 
Toujours.
 
Sa destination.
 
 
 
Le garrot.
 
L’épaule d’écarlate.
 
Le confirment.
 
 
 
Seuls les yeux.
 
Attestent.
 
Du contraire.
 
 
 
Et l’épure.
 
De sa fixité témoigne.
 
De la grandeur d’un tout.
 
 
 
Corps splendide.
 
Maintenant.
 
Objet de dépeçage.
 
 
 
Semblable.
 
A beaucoup de ceux.
 
De son ordre.
 
 
 
Il retournera.
 
Ainsi.
 
A la destination bouchère.
 
 
 
A laquelle.
 
Son état d’animal.
 
L’assigne.
 
 
 
Autour de lui.
 
Des hommes en blanc.
 
S’activent.
 
 
 
Habiles.
 
Dans leur office.
 
Les lames tranchent.
 
 
 
La précision des gestes
 
Etourdit
 
Le terrible de la chose.
 
 
 
Et fait d’une activité marchande.
 
Un spectacle.
 
Aux relents d’interdit.
 
 
 
Comme un remake.
 
D’exécution capitale.
 
A l’heure de l’apéro d’une fin d’après-midi.
 
 
 
La chair entaillée.
 
Rend acre.
 
L’air du soir.
 
 
 
Les tabliers.
 
Et bottes de plastique blanc.
 
Vont et viennent autour de lui.
 
 
 
«Confutatis maledictis
 
Flammis acribus addictis.
 
Voca me cum benedictis.
 
 
 
Oro supplex et acclinis. 
 
Cor contritum quasi cinis.».
 
Dit le Requiem de Mozart.
 
 
 
L’eau.
 
Disperse.
 
Le sang.
 
 
 
«Sa langue fume 
Et la haine.
 
Dans ses entrailles, brûle et gronde».
 
 
 
L’enfoui.
 
Des secrets de sa race.
 
Est livré aux regards indiscrets.
 
 
 
Le cœur est de gueules héraldique.
 
Des poumons blancs venait le souffle terrible.
 
L’intestin est de nacre.
 
 
 
Et la pisse fumante.
 
Ruisselle.
 
Vers l’égout.
 
 
 
La beauté.
 
Est devenue.
 
Carcasse.
 
 
 
Obscène.
 
Dans sa nudité.
 
Dévoilée.
 
 
 
Mais expressive.
 
Comme un Christ.
 
Sur la croix.
 
 
 
Et avant que.
 
Les camions frigorifiques.
 
L’emportent.
 
 
 
Au-delà
 
Des bravos.
 
De l’admiration.
 
 
 
Et plus au-delà.
 
Encore.
 
Des fleurs printanières du campo.
 
 
 
Il ne reste.
 
De lui.
 
Que le souvenir de son hideux écorché...
 
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Datos 
 
Le Bœuf écorché est un tableau peint en 1655 par Rembrandt (1606/1669). Il mesure 94 cm de haut sur 69 cm de large.
 
Il est conservé au musée du Louvre.
 
La toile donne à voir dans la carcasse de l’animal une métaphore de la souffrance et de la mort. En d’autres termes, le tableau nous mettrait face à une tragédie, qu’elle soit humaine ou animale.
 
Dans le sillage de Rembrandt, d’autres artistes comme Francis Bacon (1909/1992) ou Chaïm Soutine (1894/1943) ont traité au cours du XXe siècle, le motif du bœuf écorché.
 
Patrice Quiot